Les agents publics doublement victimes des choix politiques en matière de protection sociale
Les agents publics, actifs ou retraités, sont souvent pointés du doigt, ils sont considérés par certains comme nantis, voire fainéants ou encore responsables de nombreuses dérives budgétaires de l’État. Pourtant, ce sont les garants du bon fonctionnement de notre société.
Contre toute attente, santé et fonction publique se sont invitées au cœur de la campagne électorale. Nous ne pourrions que nous en réjouir si la surenchère de propositions des candidats n’était pas aussi virulente pour notre mouvement.
Double peine
Les hostilités sont doublement ouvertes avec des programmes particulièrement vifs tant sur l’assurance maladie que sur les effectifs des agents publics ! Côté santé, entre suppression pure et simple des mutuelles pour certains et augmentation de leur part dans le financement des dépenses de soins pour d’autres, la question de l’articulation entre assurance maladie obligatoire et assurance maladie complémentaire (AMO/AMC) et du rôle des mutuelles est clairement posée.
Si la Mutualité Fonction publique (MFP) ne peut que s’inscrire dans ce débat, ramener ces questions de société au seul examen des coûts de gestion des organismes complémentaires paraît pour le moins rapide ! La Drees vient d’ailleurs de s’exprimer sur le sujet . Elle confirme, chiffres à l’appui, les gains significatifs des mutuelles de fonctionnaires pour leurs adhérents du fait, par exemple, des tarifications solidaires (inexistantes chez les assureurs).
« 67% des français sont contre la réduction des effectifs dans la fonction publique ! »
Revendiquer la suppression de quelques 500.000 postes dans la fonction publique au seul motif de son coût, est-ce bien sérieux ? Alors que les citoyens sont en demande de toujours plus de services publics, répondre aux besoins des Français par des raccourcis n’est pas satisfaisant. Ce mois-ci, 67% d’entre eux se sont d’ailleurs exprimés contre la réduction des effectifs dans la Fonction publique ! Cela, qui l’entend ? Sur ce point, le Conseil économique, social et environnemental, est lui-même intervenu pour pointer du doigt les mesures expéditives martelées depuis le début de la campagne. Le seul examen de la masse salariale ne peut être suffisant pour porter « une démarche budgétaire rigoureuse en matière d’effectifs » dans la fonction publique.
C’est donc un mauvais procès qui est fait au mouvement mutualiste et à sa composante fonctionnaire, encore et toujours réduite à une variable d’ajustement économique, avec en point de mire l’éternelle remise en cause du statut des fonctionnaires.
Agents publics, des privilégiés en matière de protection sociale ?
Dans ce contexte électoral anxiogène pour ceux qui ambitionnent de préserver les droits sociaux et statutaires des fonctionnaires actifs et retraités, le constat est pourtant là ! Les agents publics sont les parents pauvres de l’aide à la complémentaire santé, et ce, dans une indifférence quasi générale et en dépit des nombreux rapports publics sur le sujet. Sur près de 8 milliards d’euros alloués par l’État pour l’accès à la complémentaire santé, seuls 32 millions d’euros sont destinés aux agents publics !
« Si l’objectif du législateur est de garantir à tous un accès à une couverture santé, comment accepter des différences aussi criantes pour les chômeurs, étudiants, retraités, agents publics ? »
Cette situation est d’autant plus inacceptable que la généralisation de la complémentaire santé en entreprise a accentué ce phénomène en drainant encore un peu plus d’argent public vers les seuls salariés de droit privé. Pour quelles raisons objectives certaines catégories de Français reçoivent plus d’argent public que d’autres pour l’acquisition de leur complémentaire ? Si l’objectif du législateur est de garantir à tous un accès à une couverture santé, comment accepter des différences aussi criantes pour les chômeurs, étudiants, retraités, agents publics…? Si l’objectif est de faire bon usage des deniers publics, comment accepter une répartition sans critères d’équité ?
De surcroît, pourquoi l’employeur public n’est-il pas soumis à une obligation de financement, là où la loi contraint bien d’autres employeurs ? Pourquoi l’État, premier employeur, ne s’applique-t-il pas les mêmes obligations qu’il impose pourtant aux autres ?
Les agents publics doublement victimes des choix politiques en matière de protection sociale
Non seulement les agents publics sont les moins aidés pour leur couverture santé mais ils risquent aussi d’être les premières victimes d’une stimulation de la concurrence, plus stérile que bénéfique. Pour preuve, le référencement dans la Fonction publique d’État, où la volonté de stimuler le « marché » pouvant à première vue paraître avantageuse, risque de ne conduire qu’à la destruction des mécanismes de solidarité, que les agents publics ont pourtant eux-mêmes contribué et contribuent encore aujourd’hui à mettre en œuvre.
Par des choix politiques, dénués de tout fondement objectif, les pouvoirs publics forcent les « portes » d’un marché déjà ouvert ! Il convient de le marteler pour tous ceux qui l’oublient sciemment : le « marché » de la fonction publique est ouvert à tous, l’adhésion des agents étant facultative.
Quels sont les réels enjeux ? La défense du modèle global et solidaire de protection sociale des agents publics ou bien l’écoute attentive portée à certains assureurs lucratifs qui viennent cibler les catégories d’assurés les plus rentables ? Les logiques de marché ou celles des solidarités ?
Plus que jamais, et loin de défendre un pré carré, la MFP s’attache à la défense des valeurs de solidarité au cœur du modèle mutualiste et des réponses apportées aux Français au travers d’un service public de qualité.
Serge Brichet
Président de la Mutualité Fonction publique (MFP)