Tant qu’il y aura des besoins de santé, les mutuelles auront des « frais de gestion »
Nous nous étions presque habitués -malgré nous- à cette petite musique selon laquelle, au rythme de publications médiatiques saisonnières, d’initiatives parlementaires isolées ou de rapports d’institutions suivant une logique exclusivement comptable, les mutuelles étaient qualifiées de nombreux maux : trop chères, pas assez concurrentielles ou encore pas assez simples d’accès.
Ces derniers mois, cette petite musique s’est transformée en procès permanent que nous ne pouvons laisser sans réponse. L’offensive menée par le ministre Olivier Véran est relayée par les médias qui reprennent ces éléments sans contradiction. Nous avons d’abord été accusés d’avoir fait des économies sur le dos des adhérents pendant la pandémie. Les contrats de couverture santé ont été assujettis à une taxe supplémentaire pénalisant injustement les mutualistes alors même qu’ils ont dû rattraper leurs soins à la sortie des confinements. Et pour finir, les mutualistes supportent la réforme du soi-disant « 100% santé ».
Hier, les mutuelles étaient attaquées pour leurs « réserves » pourtant rendues obligatoires par les directives Assurance européenne et Solvabilité. Aujourd’hui, nous le sommes au sujet de nos « frais de gestion » pourtant indispensables à la réponse aux besoins des adhérents.
Rien ne nous oblige à nous abaisser au niveau du gouvernement.
Plus récemment, le gouvernement a mis l’accent sur la question des frais de gestion des mutuelles en les comparant à ceux de la Sécurité sociale. Or, ici, rien n’est pas comparable entre les frais de liquidation des prestations monétaires de la Sécurité sociale et ce qu’on entend derrière le vocable frais de gestion des mutuelles.
En outre, il est utile de faire valoir que c’est une obligation règlementaire, calquée sur le plan comptable des assurances imposé aux mutuelles, qui fait de toute « prestation non-monétaire » un « frais de gestion ». Dit autrement, tout ce qui n’est pas remboursement direct, sonnant et trébuchant à l’adhérent est « frais de gestion ».
Défendre les frais de gestion, c’est défendre l’accès aux droits et à la santé des adhérents et de la population.
La principale chose qui compte en matière de protection sociale est de savoir à quels besoins de santé nous devons répondre collectivement.
Aujourd’hui, 5 millions de personnes n’ont pas de complémentaire santé et ont besoin d’être couvertes pour limiter leur reste à charge. Rappelons qu’un salarié mutualiste qui tient une permanence d’accès aux droits pour les personnes sans complémentaire santé, c’est un frais de gestion qui contribue pourtant à réduire les inégalités de santé.
Les dépassements d’honoraires ont atteint 2,4 milliards d’euros pour les soins de ville en 2018, ce qui constitue autant de reste à charge pour la population et entraîne du renoncement aux soins. Rappelons qu’un centre de santé mutualiste sans dépassement d’honoraires et sans avance d’argent, c’est aussi un frais de gestion qui facilite l’accès aux soins de toutes et tous.
3,8 millions de Français ont eu ou vivent avec un cancer qui, plus tôt il est décelé, peut être traité au mieux. Rappelons qu’une action de dépistage du cancer du sein ou une action de sensibilisation aux méfaits du tabagisme menées par des militants mutualistes auprès des adhérents et du grand public, c’est un frais de gestion qui permet une meilleure prise en charge et le renforcement de la prévention et de la promotion de la santé.
Tous ces frais de gestion seraient donc du gaspillage ?
Revendiquons un financement de la Sécurité sociale à la hauteur des besoins.
Assumons nos frais de gestion en valorisant les actions pour l’accès à la santé de toutes et tous que nous réalisons au quotidien. Mais exigeons aussi une augmentation des « frais de gestion » de la Sécurité sociale. C’est une condition pour passer à un système plus préventif que curatif et pour faciliter l’accompagnement de l’ensemble des assurés sociaux, y compris les plus éloignés de notre système de protection sociale.
Plutôt que faire diversion en mettant en procès les mutualistes, ce gouvernement aurait dû s’attaquer aux besoins des populations : réduire les dépassements d’honoraires, répondre aux problèmes d’accès aux soins, développer la prévention ou encore renforcer le financement de la Sécurité sociale.
Faire de la santé un droit effectif pour toutes et tous, voilà la priorité.